Extraits choisis du Zohar - (in "Le Zohar" présenté par Gershom Scholem)

(traduit de l'anglais par Edith Ochs).

Les trois filaments de l'esprit (Zohar I, 62a - édition de Mantoue de 1560)

"Et Noé engendra trois fils" (Gen. VI, 10)

Rabbi Hiyya dit à Rabbi Yéhouda : Je vais te répéter ce que j'ai entendu dire à propos de ce texte. Cela peut se comparer à un homme qui était entré dans le fond d'une caverne, et en sortirent ensemble deux ou trois enfants fort différents de caractère et de comportement : l'un est plein de vertus, le second plein de vices, et la troisième, entre les deux. De même, il y a trois parties de l'esprit qui vont ici ou là, sont attirées vers trois mondes différents. Neshama (l'âme supérieure-"l'âme sainte, qui est la forme intuitive la plus profonde qui conduit aux secrets de Dieu et de l'univers) jaillit et pénètre entre les défilés montagneux où elle est rejointe par roua'h (l'esprit). Puis, elle descend vers le bas où nephesh (l'âme vitale-l'âme animatrice que tout homme a reçue) rejoint roua'h, et les trois sont enroulés en un seul écheveau.

Rabbi Yéhouda dit : Nephesh et roua'h sont enlacés, alors que neshama a sa demeure dans la nature intime de l'homme, en un lieuqui ne peut être connu ni découvert. Si un homme aspire à une vie pure, il y sera aidé par la sainte neshama, par laquelle il est purifié et sanctifié, et atteint au rang de saint.

S'il n'aspire pas, au contraire, à devenir un juste et à mener une vie de pureté, il n'est pas animé par la sainte neshama mais seulement par les deux degrés de nephesh et roua'h. Bien plus, qui s'aventure dans l'impureté s'y enfonce de plus en plus, et l'aide céleste lui est retirée. Ainsi, chacun avance sur le chemin qu'il a choisi.

Le plus haut degré de la foi (Zohar I, 83b)

L'"âme" (nephesh) est intimement liée au corps qu'elle sustente et entretient; elle est, en bas, le premier élan. Lorsqu'elle en est digne, elle devient le trône où siège l'"esprit" (roua'h), ainsi qu'il est écrit : "Jusqu'à ce que l'esprit se répande sur nous, d'en haut" (Isaïe, XXXII, 15). Et lorsque tous les deux, l'âme et l'esprit, se sont dûment préparés, ils sont dignes de recevoir l'"âme supérieure" (neshama) qui siège elle-même sur le trône de l'esprit (roua'h). L'âme supérieure domine tout, et ne peut être perçue. Il y a donc un trône sur un trône, et, au plus haut, un trône.

En scrutant ces degrés de l'âme, on parvient à pénétrer la sagesse suprême, et seule la sagesse permet ainsi de lier certains mystères. C'est à nephesh, l'élan d'en bas, que le corps est attaché, tout comme, dans la flamme d'une chandelle, la lumière obscure à sa base adhère étroitement à la mèche sans laquelle elle ne serait pas. Une fois allumée, elle devient un trône pour la lumière blanche au-dessus d'elle et, lorsque toutes deux se consument, la lumière blanche devient un trône pour une lumière à peine distincte, essence inconnaissable qui repose sur la lumière blanche; ainsi le tout devient une lumière parfaite.

Il en va de même pour l'homme qui parvient à la perfection et qui est appelé "saint", ainsi qu'il est dit dans le verset : "Aux saints qui sont sur la terre" (Psaume XVI, 3). Et il en est de même dans le monde d'en haut. Ainsi, lorsque Abram entra dans le pays, Dieu apparut devant lui et Abram reçut le nephesh et en cet endroit il éleva un autel au degré correspondant (de divinité). Ensuite, il "partit, allant et se déplaçant vers le sud" (Gen. XII, 9), et il reçut le roua'h. Il parvint enfin, par neshama, au point suprême de l'adhésion à Dieu, et alors "il construisit un autel au Seigneur", ce qui indique le degré ineffable qui est celui de neshama. Voyant alors qu'il lui fallait se mettre à l'épreuve et passer par les différents degrés, il descendit aussitôt en Egypte. Là, il se garda de la séduction des essences démoniques et, après avoir été mis à l'épreuve, il retourna chez lui. De fait, il "remonta de l'Egypte" (Gen. XIII,1), sa foi affermie et assurée, et il accéda au plus haut degré de la foi. Dès lors, Abram connut la sagesse suprême; il s'attacha à Dieu, et il devint la main droite du monde.

Les trois aspects de l'âme (Zohar II, 141b)

Les noms et les degrés de l'âme humaine sont trois : nephesh ("âme vitale"), roua'h ("esprit") et neshama ("âme supérieure"). Toutes les trois sont comprises l'une dans l'autre, mais elles ont chacune une demeure propre.

Tandis que le corps se décompose dans la tombe et se réduit en poussière, nephesh reste avec lui et parcourt ce monde, allant de-ci, de-là parmi les vivants, s'enquérant de leurs peines et intercédant en leur faveur, s'il en est besoin.

Roua'h se retire dans le Jardin de l'Eden terrestre. Là, cet "esprit", désireux de jouir des plaisirs du Jardin merveilleux, se drape de ce que l'on pourrait appeler un vêtement, d'une semblance, une apparence du coprs dans lequel il séjournait ici-bas. Les jours de sabbath, de néomie et de fête, il monte jusqu'à la sphère céleste et en savoure les délices, puis il revient au Jardin. C'est pourquoi il est écrit : "Et l'esprit retourne à Dieu qui l'a donné" (Ecclésiaste XII, 7), aux temps fixés, comme nous l'avons dit.

Mais, neshama monte aussitôt rejoindre sa place dans le domaine don’t elle a émané, et c'est par elle que la lumière s'allume pour briller en haut. Ensuite, jamais elle ne redescend sur terre. En neshama se réalise l'Un qui englobe tous les côtés, celui d'en haut et celui d'en bas. Et, tant que neshama n'est pas montée pour s'unir au Trône, roua'h ne peut être couronné dans le Jardin d'en bas, et nephesh ne peut trouver le repos; mais lorsqu'elle monte, ils trouvent le repos.

Lorsque les enfants des hommes, dans la peine et la douleur, se rendent sur la tombe de ceux qui s'en sont allés, nephesh est réveillé et va faire lever roua'h qui, à son tour, réveille les patriarches, et ensuite neshama. Et le Saint, béni soit-Il, a pitié du monde.

Mais si neshama, pour quelque raison, n'a pu remonter à sa place, roua'h, parvenant à la porte du Jardin d'Eden la trouve fermée; incapable d'entrer, il erre solitaire et abattu. Nephesh, pendant ce temps, court elle aussi à travers le monde, et, voyant le corps qu'elle habitait autrefois dévoré par les vers et soumis au jugement de la tombe, elle s'afflige sur lui, ainsi que le dit l'Ecriture : "Mais sa chair se lamente sur lui et son âme est en deuil" (Job XIV, 22).

Tous connaissent donc la souffrance jusqu'au temps où Neshama est capable d'accéder à sa place d'en haut. Mais, alors, chacun des deux autres est uni à son juste lieu, car tous trois sont un, formant une unité, entrelacés par un lien mystique.


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